#13 – « La ballade des chats » d’Henry de Fleurigny




Il en est de tout noirs, des chats d’Andalousie
Exubérants d’amour et fous de jalousie :
Des chats à la peau brune, au pelage soyeux,
Sortant au moindre appel de leur douce paresse
Pour se tendre à la main d’où leur vient la caresse
Et se cambrer joyeux !

Il en est de tout roux, des grands chats d’Allemagne,
Importés sur le Rhin du temps de Charlemagne :
Des chats très froids, très mous que chacun peut saisir,
Sans les tirer de leur état soporifique,
Des chats qu’on flatte en vain et qui se laissent faire
Sans plainte et sans plaisir !

Il en est de tout blancs comme un bloc de Carrare,
Des chats immaculés, le chat vierge — très rare —
Farouche au premier qui les frôle de près,
Égratignant leur maître aussitôt qu’il fait mine
D’effleurer de ses doigts leur délicate hermine…
Mais se calmant après !

Il en est de petits, de moyens et d’énormes,
D’obèses, de fluets et de toutes les formes.
Certains bâillent d’ennui, certains autres sont gais ;
Certains ont par moments des ardeurs érotiques,
Certains sont, au contraire, hébétés, chlorotiques,
Tristes ou fatigués.

Mais comme dans l’Eden, les chats et l’Ève humaine
Sont soumis de naissance au même phénomène,
Qu’ils soient noirs, blancs ou roux, dodus ou rabougris,
Dès que la nuit s’abat sur les toits et les tentes
Toutes les femmes ont des ivresses latentes,
Et tous les chats sont gris !

Henri de Fleurigny (1846 – 1916)

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Photos : Andrei Ivashenko – luseen – 123rf

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